Le garçon d’ascenseur

Le garçon d’ascenseur

De Paul Busson

Publié dans Simplicissimus N° 36, 9e année du 29 novembre 1904,
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Bien que n’appréciant guère le Veuve Clicquot demi-sec, je n’opposai aucune résistance lorsque Bajan commanda la deuxième bouteille après m’avoir lancé un regard interrogateur. Au contraire, voir les joues creuses de mon pauvre ami rougir progressivement me rendait heureux ; je rajustai avec prudence une des deux cannes anglaises posées contre sa chaise dans la mesure où elle menaçait de glisser sur le parquet dépourvu du moindre tapis. Lire la suite

Alors là… en effet

Alors là… en effet

De Gustav Meyrink

Publié dans Simplicissimus N° 33, 9e année du 8 novembre 1904, 
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Mon cher ami Wärndorfer !

Malheureusement, je n’ai pas eu le plaisir de vous rencontrer chez vous et ne parviens pas non plus à vous trouver ailleurs, je me vois donc dans l’obligation de vous prier par la présente de bien vouloir vous rendre ce soir à mon domicile en compagnie de Zavrel et du docteur Rolof. Figurez-vous donc qu’après avoir débattu hier soir au cercle « Lotos » pendant une heure avec le célèbre professeur Arjuna Zizerlweis de Suède (dont vous avez certainement entendu parler ?) au sujet de phénomènes de spiritisme je l’ai invité pour ce soir chez moi et il a accepté. Il est très impatient de faire votre connaissance et je pense qu’en le soumettant suffisamment à notre feu croisé nous pourrons le gagner à notre cause et rendre peut-être de cette manière un service inestimable à l’humanité…
Donc vous viendrez sans faute, n’est-ce pas ? (Que le docteur Rolof n’omette pas d’apporter les photographies.) Lire la suite

L’eau de la séparation

L’eau de la séparation

De Karl Pauli

Publié dans Simplicissimus N° 26, 9e année, du 20 septembre 1904, 
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C’était l’anniversaire de mon épouse. Afin de ne pas troubler la belle fête par une fausse note, je m’étais déjà absenté immédiatement après le petit déjeuner. Au moment où j’étais en train de déguster mon dîner dans une brasserie, mon ami Treuenberg entra, Treuenberg était mon meilleur ami, collègue de travail et ancien camarade d’études. Puisque cela faisait des années que nous nous étions revus, je me précipitai avec joie vers lui, tandis qu’il répondit d’un air froid et distrait à mes salutations chaleureuses.
« Mais que t’arrive-t-il donc ? » demandai-je finalement, « es-tu malade ? As-tu des soucis ? »
Il eut un rire amer.
« Tu ne le sais donc pas encore ? » s’écria-t-il. Lire la suite

La valise

La valise

De Kurt Aram

Publié dans Simplicissimus N° 2, 9e année, du 5 avril 1904,
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Lorsque nous entrâmes chez Emil, il était assis sur une grande valise jaune, au centre. À sa gauche, encore sur cette même valise, trônait un minuscule canon, tandis qu’à sa droite un morceau de papier rectangulaire était posé, la face recto tournée vers le bas. Il ne semblait absolument pas s’apercevoir de notre présence et regardait fixement devant lui. Je m’apprêtai à lui adresser la parole, mais mon accompagnateur, tout en prenant place près de la fenêtre, me fit signe de me taire et d’attendre.
La pièce était totalement silencieuse. Seule une grosse mouche tournait de temps à autre là-haut sous le plafond blanc. Avec une attention particulière, Emil dirigeait à chaque fois son regard vers le plafond, se saisit du petit canon, mais le baissa aussitôt lorsque la mouche se calmait ce qui se produisait toujours très rapidement car elle était de toute évidence trop grosse et trop fatiguée pour mener à bien ses tentatives de s’échapper de la pièce avec suffisamment d’énergie et de persévérance. Lire la suite

Une mort comique

Une mort comique

De Kurt Aram

Publié dans Simplicissimus N° 8, 9e année, du 17 mai 1904,
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C’était la première véritable journée du printemps. La jeune et fraîche verdure jaillissait de toutes parts, la première floraison des jeunes arbres fruitiers venait d’éclore, un orage avait même éclaté très tôt dans la matinée avec force tonnerre et grand fracas de foudre, il n’avait cependant apporté que très peu de pluie, s’étant contenté d’asperger doucement tout ce jeune vert et blanc des arbres et des arbustes à la manière d’un arrosoir de serre qui s’y connaissait en plantes. Lire la suite

L’examen

L’examen

De Karl Pauli

Publié dans Simplicissimus N° 1, 9e année, du 29 mars 1904,
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Un beau jour, je fus convoqué en tant que témoin devant la cour de justice. S’agissant d’une affaire très simple de tentative de faux en écriture concernant une lettre de change en lien avec une tentative de chantage, il me fut donc facile et agréable de témoigner. Dans la mesure où l’affaire s’était limitée aux tentatives, l’accusé fut acquitté ; mon Dieu, sachant qu’il est possible de tenter tout un tas de choses dans la vie, tout cela ne m’étonna donc guère ; en revanche, ce qui me surprit bien davantage était le fait d’apercevoir mon ami Wundtke assis à la table des juges. Lire la suite

Blamol

Blamol

Un conte de Noël

De Gustav Meyrink

Publié dans Simplicissimus N° 39, 8e année, du 22 décembre 1903, 
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« Il est vrai, sans mensonge, certain & très véritable :

   Ce qui est en bas, est comme ce qui est en haut. »

La Table d’émeraude

Le vieux calmar était assis sur un gros livre bleu récupéré dans une épave et en suçait lentement l’encre d’imprimerie. Les habitants de la terre ferme n’ont aucune idée des tâches que peut accomplir un tel calmar tout au long de sa journée. Celui-ci s’était consacré à la médecine, du matin jusqu’au soir les deux pauvres petites étoiles de mer étaient obligées de l’aider à tourner les pages du livre tout simplement parce qu’elles lui devaient tant et tant d’argent. Lire la suite

Le rendez-vous

Le rendez-vous

De Paul Busson

Publié dans Simplicissimus N° 38, 8e année, du 15 décembre 1903,
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Dès son réveil, la jeune femme ressentit une frayeur sourde, son cœur se mit à battre avec véhémence. C’est alors qu’elle se souvint avoir promis à Gilbert de lui rendre visite à la maison des artistes.
Sur sa table de nuit à côté du lit de laiton repose une carte postale de Southampton, revêtue d’une brève salutation hâtive de la main de son époux. Il avait rédigé cette carte au moment de la signature de son contrat avec Ellington Brothers & Cie.
Les rideaux de soie écrue laissent passer une chaude lumière tandis que le bruit des rues désormais en éveil lui parvient comme un murmure. Qui pouvait bien être ce vieux monsieur au visage rasé de près qui l’avait observée avec autant d’insistance lors de sa conversation décisive avec Gilbert ? En tout état de cause, il lui avait été présenté, mais comment parvenir à retenir tous les noms ? Lire la suite

Herba cannabis Indicae

Herba cannabis Indicae

De Paul Busson

Publié dans Simplicissimus N° 33, 8e année, du 10 novembre 1903,
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Le sentier est escarpé et rocailleux. Au-dessus de la forêt, les nuages de pluie s’accumulent, les maigres buissons d’épine-vinette frémissent sous les rafales d’un vent glacial.
Le docteur Preinthaller s’arrête quelques instants afin d’essuyer de ses grosses mains les manches de sa veste de loden dégouttant de pluie. La route est longue jusqu’à la ferme des Bachleitner et à l’auberge du Cerf Doré un nouveau fût venait d’être mis en perce. De quel mal pouvait donc être atteint cet Anglais fou ayant acquis le domaine dans le courant de l’été et qui y séjourne à présent en compagnie de son serviteur ? Un rhume peut-être ! Lire la suite

La feuille-soleil

La feuille-soleil

Par Otto Erich Hartleben

Publié dans Simplicissimus N° 30, 8e année, du 20 octobre 1903, 
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La ville qui me vit naître est située tout en haut d’une montagne ténébreuse. Librement balayée par les vents, elle est entourée de vastes prairies sur lesquelles prolifère le trèfle.
Ces prairies descendent de toutes parts, quelle que soit la direction empruntée, tous les sentiers conduisent bientôt dans une forêt silencieuse. Ses sapins argentés sont noirs et graves. Le hallier est à la fois énigmatique et effrayant. Sans cesse, les invisibles sources de la montagne y bruissent et murmurent. Leur bruissement s’accentue encore durant la nuit. Lire la suite

L’esprit de la terre

L’esprit de la terre

Par Alfred Polgar

Publié dans Simplicissimus N° 29, 8e année, du 13 octobre 1903,
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Cinq messieurs étaient tombés amoureux de la même jeune dame. Ils se prénommaient Arthur, Bertram, Celestin, Daniel et Ernst. Leur nom de famille n’ajouterait rien à notre propos. La jeune dame s’appelait Lilian Kingshott. C’est tout du moins ce qu’elle prétendait. Lire la suite

Dr. Lederer

Dr. Lederer

De Gustav Meyrink

Publié dans Simplicissimus N° 24, 8e année, du 8 septembre 1903,
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« Avez-vous vu cette foudre? – Il a dû se passer quelque chose à la centrale électrique. – Voyez là-bas, juste au-dessus des immeubles. »
En effet, plusieurs personnes s’étaient arrêtées pour regarder dans la même direction…. … Une épaisse couche nuageuse s’était immobilisée au-dessus de la ville, coiffant la vallée de son couvercle noir… … la vapeur s’élevant des toits voulait éviter que les étoiles ne se moquassent de cette sotte humanité. Lire la suite

L’eau dense

L’eau dense

De Gustav Meyrink

Publié dans Simplicissimus N° 14, 8e année, du 30 juin 1903
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Une jubilation sans borne régnait au club nautique « Clia ». Rudi, surnommé ‘Poisson en gelée’, le deuxième homme de proue, s’était laissé convaincre et promit finalement de participer. L’aviron à huit était donc au complet. Dieu merci ! Lire la suite

Par la fenêtre

Par la fenêtre

Publié dans Simplicissimus N° 17, 8e année, du 21 juillet 1903 
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De Kurt Aram

À présent, cela fait dix ans déjà. À cette époque, j’étais encore très jeune ; périodiquement, j’allais très mal du point de vue pécuniaire pendant quelques jours par mois, vois-tu, ainsi devais-je rester trois, voire quatre, parfois même jusqu’à cinq jours d’affilée chez moi à la maison. Cet ennui m’arrivait généralement douze fois par an. Il n’y avait strictement rien à faire. Lire la suite

La sphère noire

La sphère noire

De Gustav Meyrink

Publié dans Simplicissimus N° 05, 8e année, du 28 avril 1903 
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C’est sous forme de rumeur en provenance d’Asie que la nouvelle parvint dans les sphères culturelles du monde occidental ; fabuleuse, incohérente à ses débuts, elle laissait entendre qu’une invention pour ainsi dire extraordinaire avait été faite par des pénitents, appelés Gosains, totalement incultes et à moitié barbares, dans l’état de Sikkim, au sud de l’Himalaya. Lire la suite